Pratiquer le Reiki, le secret pour vivre dans le flux de la vie
Translated by Catherine Clisson
Yolanda : Bonjour à tous, bienvenue au Sommet mondial de Reiki Ryoho. Je m’appelle Yolanda et je suis aujourd’hui avec Frans Stiene.
Nous allons parler de la pratique du système du Reiki : le secret pour vivre dans le flux.
Frans, avant de commencer, je tiens à te remercier d’avoir pris le temps de converser avec nous aujourd’hui.
Frans : Merci, et merci de m’avoir invité. Je suis vraiment ravi d’être ici et de participer à cette grande conférence, bien sûr. Tant de merveilleux intervenants, c’est fantastique.
Yolanda : Oui, c’est très enrichissant et tellement amusant.
Avant de commencer, même si tu es déjà venu ici auparavant, j’aimerais donner à tout le monde un bref aperçu de ton parcours.
Frans est un auteur et aussi cofondateur de l’International House of Reiki et de Shibumi, l’association internationale Reiki, avec Bronwen Logan.
Frans adore voyager, enseigner et écrire. Il enseigne la méditation à l’échelle internationale depuis plus de 20 ans, ainsi que la pratique du Reiki.
Frans est passionné par l’étude des enseignements bouddhistes ésotériques japonais comme Shingon, Tendaï et Shugendo, et il les enseigne sous une perspective moins stricte pour que nous puissions tous bénéficier de ces merveilleux enseignements.
Son principal objectif est d’aider les gens à se souvenir de leur véritable identité, car ce n’est qu’en se rappelant cette vérité que nous pouvons commencer à créer un monde empreint de compassion et de sagesse.
Depuis le début des années 2000, Frans a joué un rôle majeur dans la recherche mondiale sur le système du Reiki, et sa compréhension pratique des influences japonaises sur le système a permis à des étudiants du monde entier de se connecter profondément à cette pratique.
Je peux témoigner que tout cela est absolument vrai, alors bienvenue, Frans.
Frans : Merci,
Yolanda : oui, merci beaucoup. Le secret pour vivre dans le flux, c’est quelque chose dont nous pourrions tous bénéficier, et je pense que beaucoup d’entre nous le recherchent, même si nous ne le formulons pas de cette manière. Peux-tu d’abord nous expliquer comment le Reiki peut nous aider à atteindre cet état de flux naturel dans notre vie quotidienne ?
Frans : Oui, je pense que, comme tu l’as déjà dit, cela concerne notre vie quotidienne. Souvent, nous avons du mal à lâcher prise ; nous nous accrochons à des choses.
Par exemple, si nous regardons les soins par les mains, nous les pratiquons déjà les mains ouvertes, n’est-ce pas ? Mais souvent, lorsque nous terminons une séance, que ce soit sur nous-mêmes ou sur quelqu’un d’autre, nous avons tendance à serrer les poings, comme pour nous accrocher. Cette tension est finalement un état d’esprit.
Cela apparaît clairement dans les préceptes du Reiki, qui reflètent un état d’esprit de non-attachement, de lâcher-prise des espoirs et des attentes, et de tout ce qui nous lie. Plus nous nous accrochons, plus nos poings se serrent, et notre énergie ne peut circuler librement et cela rend difficile le fait de se sentir en harmonie avec le flux naturel de la vie, car nous voulons que certaines choses se passent d’une certaine manière.
Et si elles ne se passent pas ainsi, nous nous mettons en colère, puis nous nous inquiétons, etc.
Donc, lorsque nous travaillons avec le système du Reiki, en faisant les pratiques de méditation enseignées dans Reiki 1, 2 et 3, les soins par les mains sur nous-mêmes, en travaillant avec les symboles et les mantras dans Reiki 2 et 3, puis, bien sûr, avec les Reiju (initiations ou harmonisations) et en travaillant aussi avec les préceptes, nous commençons à nous adoucir alors en appliquant ces pratiques, petit à petit.
Et en fait, dans le mot Reiki, nous pouvons déjà voir quelque chose à propos de ce flux. Quand nous regardons le kanji de “Rei”, nous voyons la pluie. Mais il ne pleut pas des glaçons, n’est-ce pas ? Et si jamais il pleut des glaçons ou de la grêle, alors cela abîme tout.
Les récoltes sont endommagées, les voitures sont abîmées, les maisons aussi, etc. Mais quand nous avons une belle pluie douce, tout est nourri.
Nous pouvons déjà voir la différence entre un glaçon et être dans un flux naturel, comme une rivière.
Et plus nous pratiquons pour être comme cette rivière, quelque chose de très intéressant alors se produit : nous pouvons être de plus en plus dans ce flux.
Si nous sommes comme un glaçon, nous heurtons constamment des choses, n’est-ce pas ?
“Ça ne va pas comme je veux”, “ça ne se passe pas comme je l’avais prévu”, et nous devenons très irrités par de nombreux éléments de notre vie.
Et ensuite, encore une fois, nous nous mettons en colère, nous nous inquiétons…
Yolanda : C’est vraiment intéressant, tu as littéralement dit cela hier à ton sujet, je ne me souviens plus de ce qu’on t’a demandé, mais cela correspond à tout ce que tu dis. Quand nous examinons les différents éléments du système et comment ils nous aident à être plus comme la pluie et non comme la grêle, pour ainsi dire…
Je pense que, pour beaucoup d’entre nous en tant que praticiens, nous abordons cela uniquement en orientant notre esprit vers l’application des pratiques pendant les séances, n’est-ce pas ?
Mais ensuite, nous agissons ou nous nous permettons d’être dans un état d’esprit différent dans notre quotidien.
Ce que je disais, c’est que l’une des choses que j’ai apprises de toi, c’est exactement tout ce que tu as partagé, mais avec la reconnaissance que ce n’est pas seulement pour les soins par les mains ou les Reiju. Mais c’est également au sujet de la manière dont nous pouvons cultiver cet état d’esprit et appliquer tous ces outils au quotidien.
Frans : Et je pense, encore une fois, que nous pouvons voir cela très clairement dans les préceptes. Aujourd’hui, cela ne se limite pas à la table de massage ou au coussin de méditation, mais à tout ce que nous faisons aujourd’hui.
Un élément clé ici, pour être dans le flux, est la gratitude. Nous le voyons dans les préceptes : sois reconnaissant. Mais la plupart du temps, nous ne sommes pas reconnaissants ou nous ne le sommes que pour les bonnes choses, n’est-ce pas ?
Mais en fait, ce qui est bon ou mauvais est très subjectif. Par exemple, hier, il y a eu une tempête. En réalité, c’est très bien, car toute la pluie a nettoyé beaucoup de choses. Mais d’autres pourraient dire : “Oh, c’est vraiment mauvais.” J’étais à vélo, j’ai simplement traversé la pluie, et ça allait mais….
Tout dépend de notre perspective. Mais si nous pouvons dire : “Je suis reconnaissant pour ce qui se passe,” cela change tout. Pour moi, une autre couche plus profonde de la gratitude est l’impermanence.
Normalement, nous voulons nous accrocher aux choses. Et quand ces choses se brisent ou disparaissent, nous ne sommes en réalité pas reconnaissants et bien sûr, nous nous mettons en colère. Ma tasse préférée s’est cassée, ma relation, ma voiture, mon travail, peu importe. Mais si nous pouvons être reconnaissants, cela nous amène à un niveau plus profond.
Pour moi, il y a beaucoup d’enseignements cachés dans les préceptes. Au Japon, il y a souvent un sens apparent et un sens profond. En surface, on lit les préceptes et on pourrait dire : “Oh, il n’y a pas de notion de flux dans les préceptes”, ou encore “Il n’y a pas d’impermanence dans les préceptes”. Mais si nous regardons plus profondément dans les préceptes, alors nous pouvons définitivement y voir ces notions.
Quand nous réalisons que tout vient et repart, tout pousse et meurt, tout se manifeste mais aussi finit par se désintégrer, cela devient déjà beaucoup plus facile d’être dans le flux.
Yolanda : Cela me fait penser à ce que tu viens de dire à propos des Gokai (les préceptes) : “Juste pour aujourd’hui.” Ou encore le fait d’aller plus en profondeur. Si je suis reconnaissant pour ce que je vis dans ce moment présent, alors je dois aussi être ouvert au moment suivant, qui peut être très différent et juste maintenir mon état d’esprit.
Frans : Nous ne savons pas ce qui va arriver. Nous pouvons aller à gauche ou à droite, prendre une décision, mais les choses peuvent changer de manière dramatique : tu tombes sur un ami par hasard, ou tu es peut-être heurté par une voiture, peu importe. Tout peut arriver…
Yolanda : Cela soulève un point intéressant, car nous avons souvent tendance à nous accrocher et même à avoir peur de perdre ce que nous apprécions ou de voir un moment se terminer. Mais une autre chose avec laquelle beaucoup d’entre nous luttent, c’est l’incertitude, ne pas savoir ce qui arrivera. Cela n’a même pas encore eu lieu, et pourtant nous sommes déjà dans cet état de tension.
Comment le Reiki peut-il nous aider à transformer cette capacité à ne pas se laisser piéger par ce qui n’a même pas encore eu lieu ?
Frans : Encore une fois, cela revient à “ne t’inquiète pas.” Ne te projette pas dans le futur, dans ce qui va se passer dans une minute, cinq semaines ou dix ans.
Je le vois un peu comme ceci : imagine une rivière gelée. Si je jette quelque chose dessus – comme ce petit coussin qui sert de support pour les bols par exemple- si je le jette sur la rivière gelée, il reste là, n’est-ce pas ? Si je le laisse là, le lendemain, il sera peut-être vraiment collé à la glace. Et si cela reste gelé, après deux jours, il pourrait être complètement encapsulé dans la glace, et maintenant il est vraiment coincé.
Mais si mon esprit et mon énergie sont comme une belle rivière qui coule, je jette cet objet dedans, et le moment suivant, il est déjà parti. C’est ce que nous appelons souvent : ne laisser aucune trace.
Normalement, nous avons toutes ces traces, et ces traces sont des attachements. Même dans les soins par les mains, par exemple, nous ne sommes souvent pas dans le flux parce que nous avons un espoir.
Un espoir que mon mal de tête s’améliore. Mais dès qu’il y a un espoir, cela signifie qu’il y a déjà une peur qu’il ne s’améliore pas. Ou encore : “J’espère que mon client ressent quelque chose,” “J’espère vivre une expérience à partager avec mon client,” ou “J’espère que mon client est guéri.”
Tout cela est basé sur la peur. Pour être vraiment libres de tout cela, nous devons lâcher à la fois l’espoir et la peur.
Et alors, petit à petit, nous pouvons être dans ce flux, mais cela revient à être ici, maintenant. Cela ne peut se trouver que dans l’instant présent, car dès que nous nous projetons dans le futur, nous perdons ce moment. C’est aussi pour cette raison que Mikao Usui n’a pas dit “demain” ou “dans deux ans” ou “hier.” Non, il a dit : “Aujourd’hui.” Aujourd’hui, sois dans ce flux, c’est suffisant.
Lâche prise sur ce qui entre et sort. N’essaie pas de t’y accrocher, car plus nous nous agrippons, plus cela devient difficile. Mais cela ne peut vraiment se produire que lorsque nous laissons de côté notre esprit étroit.
Quand notre esprit est étroit, nous retenons, nous agrippons les choses. Mais si nous ouvrons notre esprit, les choses circulent plus facilement. Si nous examinons les symboles et les mantras du Reiki, ils parlent tous d’un état d’esprit ouvert.
Par exemple, le troisième symbole et mantra du Reiki, lorsqu’il est traduit, signifie : “Ma nature originelle est un esprit juste.” Déjà, cela ne dit pas : “Ma nature est confuse.” Non, cela dit que ta nature originelle — celle qui était encore fluide, comme celle d’un enfant.
Les petits enfants sont encore dans le flux. Ils sont tellement fluides : “Allons à gauche, allons à droite,” tout est simple pour eux. Mais en grandissant, nous devenons de plus en plus rigides, comme de la glace. Cela devient très difficile d’aller avec le flux.
Traditionnellement, notre nature originelle est fluide. Mais en grandissant, cela devient de plus en plus rigide à cause des peurs, des inquiétudes, des pressions sociales, etc. Et pourtant, ma nature originelle reste un esprit juste.
En japonais, cet “esprit juste” est souvent appelé Mushin ou “esprit sans attachement.” Dans la tradition zen, Mushin est utilisé dans le zen, les arts martiaux, l’arrangement floral, Shugendo et bien d’autres disciplines. Mikao Usui faisait référence à Mushin dans ses enseignements. Mushin signifie un esprit qui ne reste coincé nulle part.
Nous utilisons souvent le troisième symbole et mantra pour le soin à distance, mais traditionnellement, il n’est pas du tout utilisé pour la distance, il sert plutôt à réaliser que notre état d’esprit est ouvert et expansé et où tout est interconnecté. Quand l’esprit est vaste et ouvert, tout peut circuler. Les choses peuvent entrer et sortir de cet espace ouvert, comme une vague.
Une vague vient et repart d’elle-même. Elle ne reste pas, mais elle est toujours de l’eau. La vague n’est pas séparée de l’océan.
Plus nous réalisons cela, plus nous comprenons que, même si ce verre tombe et se brise — même si c’est mon verre préféré — il fait toujours partie de l’univers. Rien ne peut vraiment disparaître.
Même si mon père est décédé il y a plusieurs années, il n’a pas disparu. Son corps physique a disparu, mais son essence est toujours là.
C’est cela, l’esprit juste. Tout circule. Et alors, il devient de plus en plus facile de vivre dans le flux.
Bien sûr, ce n’est pas toujours facile. Nous sommes constamment confrontés aux événements de notre vie quotidienne. Mais c’est pourquoi, dans le Reiki 1, nous avons cette belle pratique appelée Joshin Kokyu Ho — “respirer dans le hara” ou dans ton tanden (juste en dessous du nombril), le centre de ton corps.
Je dis souvent que nous devrions être comme mon ami, le jouet culbuto. Ces jouets vacillent, mais ne tombent pas. C’est leur beauté.
Un jouet culbuto peut vraiment être dans le flux : il est flexible, mais en même temps bien ancré et centré. Peu importe ce qui se passe, il revient toujours en équilibre.
Et alors, nous pouvons vraiment être dans ce flux. Je pense que c’est un autre élément essentiel déjà enseigné dans le Reiki 1, non seulement à travers le précepte de “sois reconnaissant”, mais aussi à travers les pratiques de méditation qui nous permettent de nous concentrer sur notre centre, notre noyau.
Ensuite, nous couplons ces pratiques avec les mains ouvertes lors des soins par les mains. Encore une fois, nous ne faisons pas cela avec des mains fermées, mais avec des mains ouvertes, un esprit ouvert. Cependant, pour atteindre cet état, il est crucial de pratiquer correctement.
Si nous pratiquons les soins par les mains tout en étant distraits — en regardant la télévision, en bavardant, ou en laissant notre esprit vagabonder — alors cet état d’ouverture d’esprit risque de ne pas se manifester. Cela ne commence à se manifester que lorsque nous apaisons notre esprit.
Pas nécessairement en arrêtant de parler verbalement, mais en calmant notre mental, en évitant les distractions du passé, du futur et même du moment présent. C’est dans cet état que nous pouvons vraiment être dans le flux.
Yolanda : C’est intéressant ce que tu dis. Cela me rappelle une de tes idées récurrentes : cette notion de fermeté et de flexibilité. Beaucoup d’entre nous ont tendance à penser qu’il faut choisir l’un ou l’autre — soit être ferme, soit être flexible. Mais tu reviens toujours à cette idée de les unifier.
Quand nous sommes ancrés et que nos esprits peuvent être très dirigés et concentrés, nous pouvons en même temps être ouverts et libres.
C’est une belle leçon que tu nous rappelles ici : il ne s’agit pas de choisir entre les deux, mais de trouver cet état équilibré. Comme tu l’as souvent mentionné, le jouet culbuto est un excellent exemple.
Beaucoup d’entre nous Frans, se posent une question importante : si je ne m’attache pas, cela signifie-t-il que je ne me soucie pas ? Si je reste dans ce flux et que je ne m’implique pas émotionnellement, est-ce que cela veut dire que je suis indifférent ou déconnecté ? Je me demande ce que tu penses de notre idée selon laquelle, d’une certaine manière, être attentionné ou compatissant est lié à l’idée que nous devons nous attacher pour prouver que nous nous soucions.
Frans : Je me souviens d’un étudiant qui m’a appelé il y a plusieurs années. Il pratiquait beaucoup et il m’a dit : Frans, je ressens davantage cette combinaison de fermeté et de flexibilité dans ma vie.
Cela nous ramène à la pratique du Gassho, lorsque nous joignons nos mains, Gassho ne se fait pas avec une main mais avec les deux mains, unies, à la fois fermes et flexibles, droite et gauche, c’est l’unification de tout cela.
Nous voyons la même chose avec Joshin Kokyu Ho, la respiration dans le hara mais aussi l’expansion, donc encore une fois l’ancrage et l’expansion se retrouvent dans le système entier du Reiki, l’unification des deux éléments opposés.
Cet étudiant m’a appelé et il a dit : “Frans, Ma famille traverse une crise, et ils sont contrariés parce que je ne me laisse pas entraîner dans leur mélodrame. Ils pensent que je ne me soucie pas d’eux.”
Pose-leur cette question :
“Pensez-vous que je peux vous aider davantage si je suis moi-même pris dans le mélodrame, ou si je reste ancré et stable ?”
Quelques jours plus tard, il m’a rappelé pour me dire :
“C’était parfait. J’ai posé la question à ma famille, et ils m’ont répondu : ‘En fait, nous ressentons que tu es le support de toute la famille maintenant.’ Si tu avais été pris dans le mélodrame, nous aurions tous coulés ensemble”.
Une amie m’a expliqué cela d’une manière merveilleuse. Son partenaire traversait une période difficile, et elle a comparé la situation à des sables mouvants. Elle a dit : « Il est dans des sables mouvants. Il veut que je m’assois avec lui dans ces sables mouvants, dans toute cette tristesse et ces problèmes. » Mais elle lui a répondu : « Je ne vais pas m’asseoir avec toi dans les sables mouvants. Je vais rester ici, debout, prête et heureuse de te lancer une corde. Mais si tu ne prends pas cette corde, elle est inutile. »
Cela montre à quel point il est essentiel d’avoir un esprit clair, sans se laisser emporter par les drames de la vie, afin de pouvoir agir avec précision et aider les autres.
Dans de nombreuses pratiques de guérison modernes, et pas simplement dans le système du Reiki, il arrive que les praticiens ou “guérisseurs” (bien que nous ne guérissions personne, nous ne faisons que faciliter) se laissent emporter. Ils disent parfois : « Je ne peux plus faire cela », ou « Je me laisse trop absorber par mes clients ou mes propres souffrances. » Je dois arrêter cette pratique car cela peut devenir accablant et trop difficile ».
Cela signifie simplement que nous ne sommes pas suffisamment ancrés et centrés dans notre propre corps. Nous vacillons comme le Culbuto. C’est pourquoi des pratiques spécifiques de méditation ont été intégrées au système Reiki par Mikao Usui, et elles sont cruciales pour rester dans le flux.
Si nous examinons le symbole et le mantra du Reiki 3, sa traduction signifie “grande lumière brillante.” J’ai beaucoup de lumière brillante ici, c’est super ensoleillé. J’ai de grandes fenêtres et il y a beaucoup de lumière qui rentre, j’ai mis des rideaux mais cela continue à rentrer malgré les rideaux, la lumière est lumineuse, la lumière ne peut être saisie, elle est dans le flux.
De même, notre esprit, notre corps et notre énergie doivent fonctionner comme la lumière – en flux constant. Depuis la conception, nous sommes déjà faits de cette lumière, mais la vie et ses drames nous en éloignent. Lorsque nous nous rappelons cette lumière intérieure, cette luminosité innée, il devient plus facile de rester dans le flux et d’éviter les drames.
Cela ne signifie pas que nous ne ressentons pas de colère ou d’inquiétude. Cela signifie simplement que, comme le jouet Culbuto, au lieu de rester à terre, au lieu de rester en colère, contrarié ou inquiet pendant un mois, deux mois, un an ou deux ans à cause des autres, des amis ou de la société, nous apprenons à nous relever dès l’instant suivant.
Quelque chose arrive et nous revenons dans notre centre le moment suivant.
Yolanda : C’est vraiment intéressant ce qui a été dit ici, car cela me fait penser à l’idée qu’à la base, si nous faisons le choix, n’est-ce pas, si je dis que je suis prêt à essayer de lâcher prise sur mes attachements, mes possessions, mes attachements émotionnels, alors tout dans le système est conçu pour nous y entraîner. Ce n’est même pas quelque chose que nous devons forcer ou sur quoi nous devons constamment réfléchir pour bien faire.
Si nous appliquons les pratiques, cela nous entraîne naturellement à expérimenter ces états dont nous parlons. Et c’est pourquoi je pense que notre pratique est si importante, bien sûr.
Cela me rappelle également ce dont tu parlais auparavant, à propos des vagues, de l’inspiration et de l’expiration, et de ne pas s’attacher à aucune de ces choses. Cela m’a fait penser au souffle : inspirer, expirer. Et nous ne marchons pas en essayant de « manger » l’air, tu vois. Nous ne cherchons pas à saisir l’air et à le retenir si fermement.
En fait, ce serait terrible pour nous si nous ne le relâchions pas. Je te remercie beaucoup d’avoir partagé cela avec nous.
Cela nous amène à l’amélioration de notre flexibilité émotionnelle, car nous avons beaucoup parlé de l’esprit et des attachements, mais même au niveau émotionnel, il y a tellement d’expériences que nous traversons. Et souvent, il y a différentes raisons qui nous poussent à vouloir nous accrocher à une émotion, pour montrer à quelqu’un ce que nous ressentons, pour nous ancrer dans un état émotionnel spécifique.
Dans cette optique, comment pouvons-nous reconnaître que le Reiki nous montre comment nous pouvons rester dans un flux émotionnel stable ?
Frans : C’est réellement difficile. Comme tu le dis, tu sais, quand on en parle, ça semble merveilleux et on montre le mouvement du Culbuto, c’est facile, mais le plus important, c’est de ressentir. Comme tu l’as évoqué, nous n’avons pas besoin de réfléchir à notre respiration, elle se fait toute seule. Donc, plus nous pratiquons, plus nous commençons automatiquement à ressentir : “Oh, je ressens moins d’attachement aux choses.”
Et cela ne signifie pas que nous ressentons moins d’amour. En fait, peut-être que nous ressentons plus d’amour, parce que je pense que nous confondons souvent l’amour avec l’attachement, n’est-ce pas ? Ensuite, nous nous attachons.
Hier, j’ai justement retrouvé un ami. Il venait d’acheter une nouvelle voiture. Je le connais depuis que j’ai 16 ans. Il a acheté une voiture super chère. Son entreprise fonctionne très bien ces dernières années, alors il s’est offert cette voiture incroyable. Mais on voyait qu’il s’y attachait tellement. Il y avait des crottes d’oiseaux dessus, et il paniquait complètement. Tu vois, nous nous attachons tellement à ces choses.
Je me rappelle, il y a quelques années, il avait aussi acheté une autre voiture. Maintenant, il en a une nouvelle. Nous étions allés à la plage (j’habite près de la plage) un jour d’été. Il a proposé que nous allions dîner à la plage. Il y avait énormément de monde. Il avait acheté une grosse voiture, tu sais, une de ces grosses voitures que nous voyons plus souvent en Amérique qu’aux Pays-Bas. Les places de parking étaient toutes petites. Oh là là, il transpirait, il n’arrivait pas à garer sa voiture. Je lui ai dit : “Tu sais, j’aurais pu garer mon vélo plus facilement que ta voiture très chère.”
En y réfléchissant, c’est un peu ironique. Il est tellement fier de sa voiture, et c’est bien, il n’y a rien de mal à ça. Mais il avait tellement peur qu’elle ait une petite rayure ou qu’il lui arrive quelque chose. D’une certaine manière, il avait “acheté de l’inquiétude”. Tu vois ce que je veux dire ?
Nous dépensons tellement d’argent pour des soucis, en fait, pour des objets auxquels nous sommes si attachés. Et si quelque chose leur arrive, nous paniquons, nous nous mettons en colère, nous nous inquiétons. Mais au final, ces choses vont forcément s’abîmer un jour, non ?
Je veux dire, nous ne pouvons pas l’empêcher. Une petite grêle, et voilà une bosse sur le toit. Nous ne pouvons pas empêcher ces circonstances extérieures. Alors, nous pouvons apprendre à ne pas s’y accrocher.
Pour moi, c’est important d’être reconnaissant : au moins, nous avons une voiture, ou un vélo, ou nous pouvons respirer matin et soir. Tout le reste, c’est du bonus. Ne t’y accroche pas.
Yolanda : C’est intéressant ce que tu dis, parce que je me demande : alors, comment profiter de la voiture ou de quoi que ce soit d’autre si tu es tout le temps nerveux à son sujet ?
Frans : Absolument. Avec les maris, les femmes, une maison, ou tant d’autres objets que nous possédons. Nous nous attachons tellement à tout cela que nous ne sommes plus dans le flux.
Dans certains enseignements traditionnels, nous faisons des méditations où, mentalement, nous visualisons que nous donnons tout. Tu commences par donner tes objets, puis ton partenaire ahah, puis ta maison. Cela t’aide à te détacher.
Et le plus important, bien sûr, ce que tu dois abandonner, c’est “je”, “moi”, “le mien”. C’est mon verre, c’est ma maison, c’est ma voiture, c’est mon partenaire, c’est mon… enfin, tout ça, n’est-ce pas ?
Et c’est pour cela aussi que lorsque nous regardons la pluie ou la mer, nous n’allons pas sauter dans la mer en disant “c’est ma mer”, n’est-ce pas ? Parce qu’aussitôt que nous disons “c’est ma mer”, nous nous fâchons parce que quelqu’un d’autre y entre ou nous nous laissons emporter.
Les éléments naturels sont un excellent moyen de réfléchir à cela en nous-mêmes. Ce n’est pas “je”, “moi”, “le mien”, ce sont simplement des choses qui viennent en notre possession temporairement, puis elles s’en vont.
Yolanda : C’est drôle, cela me rappelle comment tu parles de l’interconnexion, et dans tout ce que tu partages, cela me rappelle comment nous parlons du Reiki de nombreuses manières comme étant excellent pour la réduction du stress, la gestion du stress, ces types de choses, et évidemment tout ce dont tu parles semble pointer vers l’idée de nous aider à soulager cela.
Mais cela soulève également la question de la connexion entre l’esprit et le corps, et comment rien n’est séparé. Et souvent, quand nous sommes dans un état d’inquiétude ou de stress, les gens pensent qu’il n’y a pas de moyen de ne pas être stressé avant qu’il y ait une résolution, ou que nous devons rester tendus jusqu’à ce que la solution arrive ou que cette chose soit réglée.
Mais peux-tu parler un peu de cette interconnexion que le Reiki met en évidence, entre la manière dont nous percevons la respiration, le corps et toutes ces choses, et comment cela se rapporte à ce que tu partages ?
Frans : Dans les préceptes, nous voyons encore une fois une phrase merveilleuse appelée Shin Shin Kaisen, l’harmonie entre l’esprit et le corps. Mon corps est toujours ici, n’est-ce pas ? Dans le moment présent. Mon corps n’est pas dans le futur, ni dans le passé. Ma respiration non plus n’est pas dans le passé ou dans le futur. Mais mon esprit, oh, mon esprit est toujours dans le passé ou dans le futur, n’est-ce pas ?
Donc, dans les préceptes, nous pouvons voir vraiment clairement que Mikao Usui nous dit de garder l’esprit dans le corps, de l’ancrer dans le corps. Et quand nous nous concentrons sur le corps, quand nous nous focalisons sur les soins par les mains, notre esprit est ici et maintenant. Mais si je fais un soin par les mains et que je me dis : Oh, peu importe où va mon esprit, alors mes mains sont là, mais mon esprit est ailleurs. Je pense peut-être déjà à aller chez Starbucks plus tard, à discuter et à prendre un petit brownie…
Alors, où va mon énergie ? Elle est également dispersée, n’est-ce pas ?
Donc, les instructions sont claires. Avec des pratiques comme Joshin Kokyu Ho, nous ramenons l’esprit et la respiration dans le corps. Nous pouvons également voir cela dans le yoga ou le tai-chi, QiGong : nous commençons toujours par se concentrer sur le corps. Pourquoi ? Parce que le corps est ici, dans l’instant présent.
Et pourquoi mettons-nous autant l’accent dans toutes ces pratiques de méditation sur la respiration ? Parce que la respiration est ici, dans le moment présent. Et donc, nous pouvons ressentir une profonde gratitude, car la gratitude ne se vit que dans l’instant présent.
Yolanda : Cela a du sens. Oui, et je dois te poser cette question, car je suis sûre que d’autres se le demandent : imaginons que toi et moi sommes en train de déjeuner, et que je suis en train de bavarder, de parler de je ne sais quoi. Mais toi, peut-être que tu veux penser à la plage ou à d’autres choses, n’est-ce pas ? Est-ce que c’est ce que tu fais dans l’instant ? Est-ce que tu ramènes consciemment ton esprit, disons, dans ton corps, dans ton être, même pendant des échanges ? Ou bien, remarques-tu que c’est un peu plus difficile de simplement profiter des interactions quotidiennes si tu ne te concentres pas sur ta respiration ? Comment navigues-tu avec tout cela ?
Frans : Oui, absolument. Nous le savons déjà. Nous pouvons voir cela dans nos relations ou lorsque nous rencontrons des gens, et particulièrement ces jours-ci, c’est très délicat avec notre téléphone portable.
L’autre jour, je suis allé déjeuner, et il y avait deux femmes assises à côté de moi. Elles étaient juste sur leur téléphone, à peine en train de parler l’une à l’autre. Je me dis : quel est l’intérêt, n’est-ce pas ?
Il n’y a aucune interaction, aucune profondeur, rien de tout cela, n’est-ce pas ? Et le téléphone, souvent, nous emmène dans des pensées du genre : Oh, j’aimerais avoir ça. Oh, j’aimerais faire ça. Oh… Puis, nous nous énervons avec ce que nous voyons, etc.
Pour moi, au début, nous nous entraînons à être vraiment dans l’instant présent. Et au Japon, il y a une phrase merveilleuse : « parfois, nous sommes tellement distraits que nous ne remarquons même pas que nous sommes distraits ».
Et puis, bien sûr, si je déjeune avec toi et que je suis tellement distrait, tu te diras au bout d’un moment : « Eh bien, Frans est ennuyeux, il n’écoute même pas, il ne fait même pas attention ».
Il n’y a pas d’interconnexion. Bien sûr, il y a une interconnexion, mais je la pollue avec ma propre confusion, n’est-ce pas ?
Voici un excellent exemple que mon professeur m’a donné une fois, et pour moi, cela a été très bénéfique. Il disait : « si nous sommes très distraits, comme ça, souvent, nous ne le voyons même pas. Mais si nous commençons à respirer profondément, à nous calmer, et qu’ensuite nous sommes distraits, cela devient vraiment, vraiment évident. »
Donc, plus nous prenons une respiration profonde, plus nous revenons à notre esprit avec ces pratiques de respiration, les soins par les mains, le travail avec les symboles et les mantras, etc., alors nous pouvons voir : « Oh, je suis en train de me distraire ».
Par exemple, quand nous chantons les préceptes, au début, cela peut être un peu difficile parce que c’est en japonais et que nous ne parlons peut-être pas japonais, mais cela nous aide à rester concentrés.
Et si je me distrais, je fais une erreur. Donc, je chante les préceptes, et puis, oh, je commence à penser à autre chose. Je me dis : « Laisse-moi revenir au chant des préceptes, laisse-moi me reconcentrer ».
Plus je fais cela, plus je peux rester concentré dans ma vie quotidienne. Et grâce à cette concentration, je réalise cette vaste ouverture et cet espace. Maintenant, c’est facile de rester dans le flux.
Yolanda : C’est tellement intéressant parce que tout revient toujours à la même chose, n’est-ce pas ? Avec tout ce que tu partages.
Par exemple, quand nous t’écoutons, nous pouvons entendre : « Ok, il parle de chanter les Gokai, des soins par les mains, de Joshin Kokyu Ho, toutes ces choses. Mais encore une fois, elles pointent toutes vers la même chose. »
Et si nous commençons, je pense, à reconnaître beaucoup de ce que tu partages avec nous aujourd’hui, alors si je suis dans l’instant avec ma respiration, non seulement je suis présente, mais mon esprit s’est ouvert.
Si je pose mes mains, je dirige mon esprit, mais je permets aussi la clarté et l’ouverture d’esprit, n’est-ce pas ?
Encore une fois, cette harmonisation des opposés dont tu parles, c’est juste très intéressant de voir comment tout revient toujours à cela.
Et je pense que beaucoup de ce que tu partages également — je pourrais dire que je viens littéralement de dire cela à quelqu’un hier aussi — grâce à tes enseignements, montre que chaque niveau pointe vers la même chose.
Chaque niveau, par exemple, c’est juste différentes façons d’essayer de te faire faire la même chose.
Et donc, je voulais te poser une question à ce sujet parce que tu as une énergie tellement joueuse, tu sais, et tu as juste cette ouverture qui peut être ressentie. C’est comme si c’était palpable, n’est-ce pas ?
Mais en même temps, il est clair que tu es aussi très diligent et concentré, présent dans toutes ces choses en même temps.
Pourrais-tu nous en dire un peu plus à ce sujet, comme le rôle que cette ouverture, ta relation à la vie, joue dans ce que le Reiki nous montre et nous enseigne ?
Frans : Oui, je pense encore une fois que, quand nous regardons l’eau, ce qui n’est pas gelé…
l’eau est fluide, elle est joueuse. Elle peut se déplacer dans n’importe quelle direction. Je peux la verser ici, et elle s’adapte à cette forme. Je peux la verser ailleurs, et elle s’adapte aussi. Elle prend toutes sortes de formes, mais de l’eau gelée, c’est impossible, n’est-ce pas ?
Chaque situation dans notre vie quotidienne est comme une forme différente. Par exemple, si je suis comme cette eau gelée, je vais rapidement m’énerver parce que je ne m’adapte pas à cette situation ou à cette autre.
Hier, par exemple, je devais aller chez mon comptable. C’est environ 45 minutes de vélo pour y aller. Je n’ai pas de voiture, donc je prends mon vélo. J’arrive, et là ils me disent : “Mais que faites-vous ici ?” Et moi : “J’ai rendez-vous.” Et eux de répondre : “Oh, elle est malade. Elle ne vous a pas prévenu ?”
J’ai dit : “Non, elle ne m’a rien dit.” Et ils s’attendaient à ce que je sois en colère ou contrarié, vu que j’avais fait 45 minutes de vélo pour rien, et qu’il fallait refaire le trajet retour. Mais j’ai plaisanté, ri un peu, et je leur ai dit : “Ce n’est pas grave, j’ai fait un peu de sport, et je peux maintenant aller boire un café.”
Ce matin, elle allait mieux, donc je suis revenu. Quand je suis arrivé, ils discutaient entre eux : “Oh, il est revenu !” J’ai répondu : “Oui, je suis de retour.” Et ils m’ont dit : “Nous pourrions vraiment prendre exemple sur vous.”
Parce que, comme ils l’ont dit, la plupart des clients auraient été contrariés. Mais le problème, c’est que nous essayons souvent de “forcer” les choses. Par exemple : “C’était mon rendez-vous, et maintenant, il est annulé.” Nous devenons comme un glaçon rigide, et dès qu’une situation change, nous ne nous y adaptons plus et nous nous mettons en colère.
Mais si nous sommes plus comme de l’eau, il est très facile de naviguer, très facile de suivre le courant.
Pour que ce glaçon fonde, il faut de la chaleur : la chaleur de l’amour, la chaleur de la compassion, la chaleur de l’ouverture, la chaleur de l’expansion, la chaleur du souffle. Souvent, quand nous faisons des soins par les mains, nous ressentons peut-être de la chaleur. Mais imaginez ressentir cette chaleur à travers tout le corps, tout l’être.
Quand j’ai vécu dans l’Himalaya pendant un an, ces yogis et yoginis portaient très peu de vêtements parce qu’ils avaient une telle chaleur intérieure. Nous pouvons voir cette idée de chaleur intérieure dans les enseignements spirituels japonais, dans l’Himalaya, et dans les enseignements chamaniques. Pourquoi ? Parce que cette rigidité fond, et nous pouvons maintenant nous adapter à n’importe quelle situation sans inquiétude ni colère. Et ainsi, nous pouvons être reconnaissants pour chaque expérience.
Yolanda : Tu sais, la beauté de ce que tu partages, et même de qui tu es en tant qu’humain et enseignant, c’est le fait de montrer aussi que notre pratique ne se limite pas à ces moments où nous méditons dans un coin ou lorsque nous sommes en séance.
Bien sûr, c’est important d’avoir une pratique dédiée, mais nous pouvons aussi pratiquer constamment, dans la vie de tous les jours. Cela n’a pas besoin d’être si rigide. Comme tu ne cesses de nous le rappeler : nous n’avons pas à être des glaçons. Nous pouvons être très, très fluides et très ouverts, et profiter de la vie. Oui, je veux dire, c’est un joli flux.
Frans : Voici une histoire intéressante. J’ai un enseignant au Japon, Takeda Ajari, qui vit dans un petit village. J’y vais depuis 2012 pour m’entraîner avec lui. L’année dernière, lors d’une visite, il me donne un balai et me dit d’aller balayer devant le temple, sur la petite rue.
Je savais qu’il m’observait, pas directement, mais à travers la fenêtre. Il regardait comment je balayais, des enfants allaient à l’école, c’était tôt le matin, mais surtout il regardait comment j’interagissais avec les enfants qui allaient à l’école et les parents qui les accompagnaient. C’est un petit village, donc les habitants étaient curieux de voir un grand étranger. Les enfants me regardaient avec de grands yeux, surpris, et certains commençaient à me parler en japonais.
À ce moment-là, j’avais le choix : je pouvais être un « glaçon », faire semblant d’être concentré uniquement sur le balai, en ignorant les interactions, ou je pouvais me mettre dans le « flux », jouer avec les enfants, rire, échanger. C’est une opportunité incroyable de voir si nous sommes dans le flux ou non.
Cela montre qu’il y a des opportunités d’apprentissage à chaque instant de la journée. Si nous ratons un bus, par exemple, sommes-nous dans le flux ou devenons-nous des glaçons, pleins de colère ou d’inquiétude ? Ou bien, voyons-nous cela comme une opportunité : peut-être pour se détendre, ou pour entamer une conversation avec quelqu’un d’autre qui attend aussi le bus ? Et qui sait, quelque chose de magique pourrait arriver.
Ces moments sont des opportunités précieuses pour apprendre et grandir. Comme le dit Mikao Usui, « aujourd’hui signifie aujourd’hui ». Cela s’applique à tout ce que nous faisons, pas seulement sur une table de massage. Si nous croyons que le système du Reiki se limite aux soins par les mains, nous faisons fausse route. Le Reiki concerne notre vie quotidienne et notre état d’esprit. D’ailleurs, les préceptes ne mentionnent même pas les soins par les mains. L’état d’esprit est la clé qui est un déclencheur pour les soins par les mains.
Yolanda : Cela me fait penser à toi, comme un glaçon, en réalité, à nous tous. Nous avons nos moments de rigidité, et j’imagine que, même en pratiquant et en étant très diligent, tu peux encore avoir ces moments, mais au lieu que cela prenne toute ton existence, cela devient juste un petit morceau de glace. Et puis, peut-être qu’il devient plus facile de l’observer, de s’asseoir avec et de permettre qu’il fonde, pour ainsi dire. Alors, pour ceux d’entre nous qui rencontrent des difficultés et qui ont souvent ces moments de rigidité, as-tu quelque chose que tu penses être un bon moyen pour en sortir, lorsque nous nous retrouvons dans cette rigidité et ce blocage, au lieu de tomber dans la culpabilisation ou l’auto-flagellation ? Que pourrions-nous faire à ce moment-là ?
Frans : Oui, je pense que tu as utilisé le mot “culpabilisation”. Laisse-moi me concentrer sur une citation taoïste géniale : “Si tu blâmes quelqu’un d’autre, tu es hors du chemin. Si tu te blâmes toi-même, tu es à moitié sur le chemin. Si tu ne blâmes personne, tu es sur le chemin.” Et j’adore ça, parce que souvent, nous blâmons. Nous blâmons le conducteur de bus, nous blâmons notre mère… Aujourd’hui, je devais emmener ma mère à la préfecture pour obtenir une nouvelle carte d’identité, et ses doigts sont rigides, donc ils ont des difficultés à prendre ses empreintes. Nous avons passé une demi-heure à essayer de prendre ses empreintes, et même maintenant, ils viennent de rappeler pour dire qu’elles ne sont pas bonnes et qu’il faut revenir. Tu sais, tu dois revenir et, tu sais, pour une personne âgée, c’est difficile. « Mais tu sais, d’accord, Maman, détends-toi, reste dans le flux. Cette femme ne peut rien y faire. La machine ne peut rien y faire, donc il n’y a pas besoin de s’inquiéter. C’est juste comme ça, c’est ainsi. Sois juste reconnaissante d’être ici, de pouvoir respirer, d’être présente, de pouvoir faire ça comme ça ». Je pense qu’il faut toujours revenir à la gratitude, mais aussi revenir à ce centrage, n’est-ce pas ? Être dans ton corps, ancrer ton esprit dans ton corps pour ne pas te laisser emporter par ce drame. Ne pas se figer constamment et puis si cela devient ton schéma habituel, cela devient de plus en plus facile.
Par exemple, je dis toujours : si je plante une graine de pomme, j’obtiens des pommes. Si je plante une graine de banane, j’obtiens des bananes. Donc, si je continue à planter de l’inquiétude et de la colère, il devient automatiquement très difficile d’entrer dans le flux, car je n’ai pas planté le flux, j’ai planté un cube de glace tout le temps. Donc, ne t’attends pas à être dans le flux demain, ou la semaine prochaine, ou dans cinq ans. C’est pourquoi les petits moments où tu es dans le flux sont déjà une pratique.
Yolanda : Je suis content que tu dises cela, parce qu’inconsciemment, beaucoup de fois, nous avons l’attente que, ok, j’ai entendu ce que Frans a dit, et maintenant je devrais pouvoir l’appliquer et demain je ne serai plus un cube de glace. Mais, tout cela est une pratique, et toutes ces choses dans le système, encore une fois, sont bien plus grandes que juste la session. Alors, comment pouvons-nous créer une pratique de Reiki simple et efficace à la maison pour nous aider à maintenir ce flux ?
Frans : Donc, encore une fois, la première chose est vraiment de se connecter.
Se connecter à ton corps.
Oui, être dans ton corps, ancré, centré. Faire des chants par exemple.
Aussi, lorsque nous chantons les préceptes, par exemple en japonais, ce chant a une certaine vibration, et si nous le faisons correctement avec une respiration profonde, cela déclenche une chaleur intérieure.
Ensuite, nous ressentons cette vibration, tu sais, peut-être dans chaque cellule, et cela crée déjà une certaine friction. La friction déclenche de la chaleur, qui fait fondre cette rigidité.
Par exemple, peut-être que nous sommes comme une rivière gelée, totalement comme une rivière gelée, et si nous faisons fondre cela, nous restons encore rigides, mais il y a des morceaux d’eau entre les glaçons, donc l’écoulement se fait plus facilement. Et donc, nous remarquons : “Oh, je peux aller un peu plus avec le flux, pas complètement encore, mais nous continuons à pratiquer.”
Aussi, dans les préceptes, nous continuons à pratiquer avec diligence, lentement, lentement, lentement, et puis un jour, nous pensons : “Oh, avant j’étais comme ça, maintenant je suis un peu comme ça, maintenant je suis comme ça.” Ou parfois, j’explique cela avec le concept de Culbuto : “Oh, j’avais l’habitude de rester comme ça pendant trois mois, et maintenant j’ai pratiqué et maintenant je reste comme cela deux mois, puis je me relève, et maintenant je pratique encore plus et maintenant je me relève après un mois, puis nous pratiquons encore et puis soudainement, oh, le déclencheur se produit et le moment suivant je suis de nouveau debout.” Et donc, lentement, lentement, nous pouvons voir ce changement en nous. Cela devient très évident. Et plus nous pratiquons, plus, comme un culbuto, il devient plus facile de trouver ton centre. Pourquoi ? Parce que tu t’es concentré sur ton centre. Pourquoi ? Parce que tu t’es concentré sur être dans le flux de plus en plus. Pourquoi ? Parce que nous nous sommes concentrés sur la chaleur de la compassion et de la gentillesse.
Yolanda : Tu sais ce que j’aime tellement dans ce que tu as dit, Frans, c’est surtout avec la partie du chant. Beaucoup de gens peuvent avoir des difficultés à l’apprendre en japonais, mais même une fois que nous le connaissons, comme tu le dis, même si nous connaissons les Gokai et peu importe quelle est notre langue maternelle, nous ne comprenons pas forcément la traduction exacte pendant que nous les disons en japonais. Et pourtant, cela a toujours un effet.
Donc, nous n’avons pas besoin de tout comprendre, pour ainsi dire, pour ressentir l’effet, comme tu dis, la vibration, et comment cela peut générer de la chaleur en nous, juste la sensation et la direction de l’esprit, toutes ces couches. Et la raison pour laquelle je le dis, c’est que cela me rappelle encore comment nous pouvons nous laisser piéger par le désir d’avoir raison ou de perfectionner certaines choses, ou d’avoir besoin de tout savoir. Et encore une fois, comme tu dis, c’est un moyen de créer notre inquiétude, nous créons déjà tout ce bruit au lieu de simplement être dans le flux de ce qui est. Ce n’est pas grave si tu ne comprends pas totalement, mais si tu es concentré, qu’es-tu en train de vivre ? Et il semble que ce principe que tu partages pourrait être appliqué à tout.
Frans : Absolument. Il n’y a pas si longtemps, cet étudiant m’a dit : “Je ne sais pas vraiment comment cela fonctionne, tu sais, ces pratiques, et j’ai besoin de savoir, blablabla.” Et il avait son téléphone, il me dit : “Je peux t’appeler, quel est ton numéro ?” Il prend son téléphone, je décroche et je lui dis : “Pourquoi tu fais ça ? Tu es assis en face de moi.” Je lui ai dit : “Tu sais comment ton téléphone fonctionne ?” Il me répond : “Pas vraiment.” Je lui ai dit : “Oui, mais tu lui fais confiance, tu viens de le prendre, tu joues avec, tu fais toutes sortes de choses, tu n’as aucune idée de comment cela fonctionne et pourtant tu le fais.” Mais quand il s’agit du Reiki ou d’autres pratiques spirituelles, nous avons besoin de savoir, de savoir exactement comment cela fonctionne. Moi, je vis au 11ème étage, je ne sais pas vraiment comment l’ascenseur fonctionne, mais je le prends tous les jours et je lui fais confiance, ça marche, non ? Oui, donc tout ça, c’est juste que nous nous laissons trop prendre par notre tête au lieu de simplement pratiquer.
Il y avait une petite histoire merveilleuse, un maître Shugendo au Japon, et il y avait deux étrangers qui venaient s’entraîner avec lui. Il leur a dit : “OK, de minuit à 6 heures du matin, vous allez chanter 10 000 mantras.” Et voici le mantra, il leur donne et leur dit : “Je vais revenir voir comment vous allez.” Donc, le moine ou le prêtre revient un peu plus tard pour vérifier comment ils vont. Il demande à la femme : “Comment ça va ?” Elle répond : “C’est trop difficile, je ne peux pas le faire, même jusqu’à six heures, je dois m’arrêter.” Il lui dit : “C’est bien, prends ton temps.” Elle arrête. Puis il va voir l’homme et lui demande : “Comment ça va ?” Et l’homme est en train de prendre un stylo et un papier. Il lui dit : “Qu’est-ce que tu fais ?” L’homme répond : “Eh bien, si je chante autant de mantras en 10 minutes, alors je peux en chanter tant en une heure, et je ne pourrai pas chanter les 10 000 avant 6 heures du matin.” Le prêtre lui répond : “Est-ce que je t’ai demandé de faire des calculs ou de chanter ?” L’homme répond : “Tu m’as demandé de chanter.” Le prêtre lui dit : “Alors pourquoi tu fais des calculs ?” Mais c’est ça, n’est-ce pas ? Nous nous laissons tellement prendre par toutes sortes d’autres choses et, parce que nous ne sommes pas concentrés, nous ne suivons souvent pas correctement les instructions.
Yolanda : Et cela me rappelle aussi quelque chose d’autre, en relation avec toi… Beaucoup de gens me demandent : “Pourquoi lorsque tu viens aux États-Unis, je continue à refaire les Shinpiden. Et je réponds : Parce que je ne sais pas ce que je vais apprendre.” Ils me disent : “Mais tu as déjà suivi la formation.” Oui, mais je ne sais pas ce que je vais apprendre, et encore plus, je ne sais pas ce que je vais vivre. Et je n’y avais jamais vraiment pensé avant, mais je pense que ça s’applique même à notre vie quotidienne. Par exemple, nous devons nous lever pour aller au travail et nous sommes souvent dans l’attente que “Aujourd’hui va être comme hier”, et là, tu crées un flux étrange, au lieu d’être dans la possibilité de dire : “Aujourd’hui pourrait être une super journée, qui sait ?” Et donc, il est vraiment intéressant de voir que nous créons beaucoup de flux que nous ne voulons probablement pas, au lieu de simplement permettre à tout ce que tu nous as partagé aujourd’hui de se manifester.
Cela me vient à l’esprit : “Et si nous commencions notre journée avec ces pratiques ? Et si nous commencions avec la présence et l’ouverture ? À quel point cela serait différent ?
Frans : Nous aurions certainement un monde plus compatissant, oui.
Yolanda : Et c’est simple quand tu l’écoutes,
Frans : mais nous compliquons tout.
Yolanda : Oui, mais c’est une chose très belle, et je veux aussi dire que je trouve ça très encourageant de voir un enseignant comme toi, qui, non seulement pratique et enseigne depuis tant d’années, mais surtout continue à pratiquer. Ce n’est pas comme si tu étais arrivé à un point où tu te dis : “C’est bon, j’ai compris, je n’ai plus besoin de faire quoi que ce soit.” Tu es vraiment un bon exemple de comment nous pouvons continuer à nous affiner et à créer un beau flux pour nous-mêmes.
Frans : C’est tellement important, mon enseignant a encore des enseignants. Mon enseignant a 70 ans et il a toujours des enseignants. Donc, ça ne s’arrête jamais. Si nous nous disons qu’en tant qu’enseignant, c’est fini et que nous n’avons plus besoin de personne d’autre, ce n’est pas très bon, non ?
Je pense aussi qu’il est très important que nous nous donnions la main et que nous nous montrions comment cela peut être fait, comment nous pouvons pratiquer, comment nous pouvons nous soutenir les uns les autres pour être dans ce flux dans notre vie quotidienne. Et je pense que cela est essentiel. Tu sais, aussi, mon enseignant m’a dit : “Frans, va dehors dans la vie quotidienne et explore-la.” Et cela est très lié à Mikao Usui, donc traditionnellement, c’est comme si tu montais dans les montagnes comme le fit Mikao Usui pour faire fondre ta “glace”, si on peut dire, puis tu redescends de la montagne dans la vie quotidienne pour montrer ce qui est possible, pas seulement pour les soins par les mains, mais pour être un exemple vivant.
Oui, un exemple vivant de gentillesse, d’ouverture, d’être dans le flux. Encore une fois, ce n’est pas toujours facile, car nous nous retrouvons encore comme cela parfois, n’est-ce pas ? Donc, nous devons continuer à pratiquer, peu importe si nous avons passé 2 ans dans les montagnes ou 6 ans, nous devons toujours continuer à pratiquer.
Yolanda : Je veux aussi souligner que, pour tous ceux qui nous écoutent, les liens sont indiqués ci-dessous pour ton site Web et toutes les façons de vous connecter avec Frans et son travail, mais tu fournis beaucoup de contenu pour nous, les praticiens, afin d’affiner notre pratique et de rester diligents dans nos pratiques.
Je veux aussi dire ceci, c’est intéressant… Hier, quelqu’un a dit, mais ce n’était pas moi cette fois, c’était quelqu’un d’autre qui parlait de toi. Ils te recommandaient, tu as écrit plusieurs livres, et l’un des plus récents, « Inner Heart of Reiki ». Ils évoquaient le fait qu’il y avait une formation qui accompagne ce livre. Il ne s’agit pas juste de lire des choses sur les différents aspects du système du Reiki, mais tu proposes ce genre de guide pour nous aider à savoir comment appliquer ces éléments. Je voulais juste souligner cela parce que, tu le sais, si quelqu’un écoute et se demande comment faire toutes ces choses dont tu parles, Frans, tu as tellement d’options qui nous aident à apprendre différentes techniques.
Frans : Oui, je pense que c’est très important. Tu le sais, certaines personnes apprennent par la lecture, certaines par l’écoute, mais bien sûr, ce dont nous avons besoin, c’est de pratiquer. Nous pouvons lire de nombreux livres de cuisine et regarder de nombreuses vidéos sur la nourriture, mais si nous ne cuisinons pas et ne mangeons pas, ce n’est pas très utile. Mais oui, « The Way of Reiki », mon dernier livre qui est sorti, est accompagné aussi d’une vidéo de 9 heures ou quelque chose comme ça. Oui, vraiment excitant. J’aime beaucoup faire cela aussi, et je pense qu’il est important que nous, en tant qu’enseignants, nous nous stimulions pour nous développer et travailler avec cela. En fait, je le fais vraiment d’abord pour moi-même. J’ai en tête une citation du jour que j’utilise vraiment pour moi-même, puis je me dis : “Ah, je peux aussi la proposer comme la citation du jour.” Mais cela m’aide vraiment, donc pour moi, certaines d’entre elles sont très personnelles pour ma propre vie et je me dis : “Oh, voici ce que je peux faire avec.”
Yolanda : Je dois dire que la raison pour laquelle je parle toujours de « Inner Heart of Reiki », c’est parce que c’est ainsi que je t’ai rencontré, grâce à ce livre. Mais « The Way of Reiki » est aussi un livre avec un accompagnement. Alors, je voudrais te poser la question suivante : quelle est la meilleure façon pour les gens de se connecter avec toi, de travailler avec toi ? Est-ce via le site web, s’inscrire à la newsletter, ces types de choses ?
Frans : Oui, c’est ça, via le site web, s’inscrire à la newsletter ou Instagram ou Facebook, ou ces genres d’éléments sur les réseaux sociaux. Mais oui, le site web est super. Il y a des blogs et des formations dessus, donc…
Yolanda : Je tiens vraiment à te remercier, Frans, pour toujours partager et nous inspirer, mais aussi pour avoir pris le temps d’avoir cette conversation. J’espère que tu auras inspiré beaucoup de gens à être dans leur flux de nouvelles façons. Alors, merci beaucoup pour ton temps.
Frans : Merci, merci pour l’interview, c’était absolument merveilleux et c’est un plaisir de te revoir.
Yolanda : C’est un plaisir aussi, et à tous, merci beaucoup de vous être joints à nous.